Le carnet d'une psychotique
La vérité ne s’écrit pas au clavier d’un ordinateur. Elle s’inscrit au plomb sur les lignes bleues d’un carnet, d’une écriture en pattes de mouche s’il le faut parce que les mots viennent trop vite et que la main tremble. Parfois, elle n’est pas jolie et si on censure en effaçant les vrais mots qui sont venus cela laisse de vilaines traces sur le papier. Pour moi, la plus grande difficulté, ce n’est pas de partager cet instant de vérité, c’est de l’accepter et de cesser d’en avoir honte.
Moi, Isobel, j’ai été prisonnière d’un univers accessible à moi seule.
J’ai souffert d’un état accentué de dépersonnalisation.
Hallucinations et délires ont accompagné mes psychoses.
L’écriture a été un refuge et c’est l’écriture qui a appaisé ma douleur en temps de crise, qui m’a apporté une certaine accalmie en temps de tempête intérieure. Pendant plusieurs mois, je me suis réveillée en pleine nuit pour être le scribe de cette voix dans ma tête qui me gardait éveillée. Des fragments de phrases, pour la plupart incohérents et nés d’une pensée sinueuse, ont remplis un carnet.
En voici quelques lignes plus ou moins droites…
Courant d’air dans la tête
Les pendules à l’heure fixe
Hors de soi
fuit le temps
Douche froide
pluie de mots
Du coq à l’âne
âme les talons
Aiguilles
des livres épinglent la main
Je prends des images plein la gueule
Lève les yeux
araignée dans le plafond
En piste
chasse aux trésors
la raison me perd
Cours toujours mon lapin
ta patte dans ma poche
Mais vous êtes folle
Soupir
Silence
les souris dansent
Le Nord
le train-train
c’est par là
Sucrez-moi le thé
Je reste plantée là
Image par la photographe Elena Kalis, source:
Le site de l'artiste:
http://www.elenakalisphoto.com/